Dans les textes constitutionnels et quasi constitutionnels français et québécois, la notion d’égalité présente un double sens : un sens formel qui fait de l’égalité un principe au fondement de l’application de la règle de droit ; un sens matériel qui fait de l’égalité une finalité de l’application de la règle de droit. Ce double sens de l’égalité n’est pas accueilli de manière semblable par les juges français et québécois de droit civil. Pour le juge français, l’égalité n’est ni un principe ni une finalité de la règle de droit civil : ce juge traite de manière différenciée les identités religieuses, en favorisant celles qui s’enracinent dans une « religion » et en déniant celles qui reposent sur une « secte ». Au contraire, pour le juge québécois, l’égalité est un principe et une fnalité de la règle de droit : tout en s’imposant un traitement uniforme des différentes identités religieuses, ce juge reconnaît, toutefois, sur le fondement du droit à l’égalité, la possibilité de favoriser certaines identités religieuses, minoritaires sur le territoire national. En fait, la défiance du juge français à l’égard de la différence des identités religieuses l’incite à la contrôler en organisant un régime différencié des cultes, alors que le désir du juge québécois de préserver la différence des identités religieuses le conduit à intervenir pour la préserver en affirmant et en assurant l’égale expression de chacune des identités religieuses au sein de la société.