Malgré les acquis obtenus par les Francophones vivant en situation minoritaire au Canada, les inégalités sociales entre les minorités francophones et les majorités anglophones persistent. Parallèlement, d’autres catégories et groupes sociaux (femmes, communautés ethniques, etc.) se trouvent au sein des francophonies minoritaires et revendiquent des droits, en conformité avec la Loi sur le multiculturalisme, sur la base de leur particularité identitaire. Que faire lorsque les intérêts des uns entrent en conflit avec les intérêts des autres? Cet essai propose un cadre de réflexion susceptible d’orienter nos recherches sur « les minorités au sein des minorités francophones ». Il se penche d’abord sur les raisons pour lesquelles les travaux portant sur la complexité des identités/inégalités sociales au sein des minorités francophones canadiennes ont émergé tardivement. Il tente ensuite, à partir de l’approche de l’intersectionnalité, d’analyser les effets du multiculturalisme sur les francophonies en situation minoritaire. Est-ce que le multiculturalisme canadien nuit aux intérêts des minorités francophones? L’idée défendue est qu’il n’y a pas lieu d’opposer les francophonies minoritaires aux autres minorités, mais qu’il est plus fécond de penser la simultanéité des processus pluriels de domination en déplaçant la polémique identitaire sur le terrain des inégalités sociales. Il est suggéré que c’est l’ambiguïté même du multiculturalisme canadien qui permet, paradoxalement, ce renversement de perspective.